INTERVIEW

Ouidad : "On peut aussi faire guérir avec les mots."

Publié le

19 octobre 2024

Le Maroc en elle, la France dans le cœur. Ouidad transmet dans sa musique sa double culture et nous invite à la douceur et au réconfort à travers son nouvel EP Il était une fois, sorti le 4 octobre dernier. Diplômée en pharmacie, l’artiste se lance dans la musique et se révèle sur les réseaux sociaux grâce à ses reprises musicales. Elle séduit rapidement le public avec son titre "Casa" qu’elle interprète en français et en arabe. Aujourd’hui, l’interprète prépare son concert au Café de la Danse, prévu le 24 octobre prochain, et nous invite à découvrir ce qui se cache derrière son univers musical.

Ouidad ©Mateo Gallego

Ouidad, vous avez sorti votre nouvel EP Il était une fois. Vous utilisez ici la métaphore d’un conte de fées, du passage à la vie adulte avec toutes les épreuves qu’on traverse quand on grandit. Dans une société où l’on devient de plus en plus hermétique à nos émotions, était-ce important pour vous de chanter à cœur ouvert ?

Oui, c’était important, car c’est vraiment un grand panel d’émotions qu’on traverse quand on passe de l’adolescence à l’âge adulte. C’est exactement ce qui s’est passé quand je suis arrivée de Casa en France. L’EP raconte tous ces changements : quitter le cocon familial, en apprendre plus sur soi, grandir…

Vous êtes docteure en pharmacie et vous faites de la musique. Comment ces deux thématiques se complètent et s'enrichissent mutuellement et quels impacts ont-elles pu avoir l'une sur l'autre ?

Elles se complètent parce qu'elles n'ont rien à voir ! À la pharmacie, je suis hyper logique et scientifique et je trouve ça plus facile parce que j'ai appris et j'applique. Alors que pour la musique, il faut vraiment que je sois dans ma bulle. Parfois, ça prend toute la journée pour trouver l'ensemble. La pharmacie a de l'impact sur la musique dans le sens où mes études m'ont appris à être très rigoureuse et à bosser dur. Et dans la musique, on peut croire que ce n’est que de l'amusement ou uniquement de la passion, mais c'est énormément de travail. J'ai eu la chance d'avoir appris ça avec mes études et de pouvoir le concilier avec la musique.

"Il ne faut pas avoir peur de ce qui nous est étranger."

Vous êtes accompagnée de Brav, qui est chanteur, et de Matthieu Mendès, auteur-compositeur. Pouvez-vous me parler de votre collaboration avec eux ?

Je suis tout le temps au studio avec Matthieu. Depuis que j'ai commencé, je suis toujours avec lui. Tout l'EP, je l'ai écrit avec Brav, ce qui fait qu'on est tous les trois au studio le plus souvent. J'ai d’abord rencontré ma manager, qui avait tout de suite une vision assez précise de ce que je pouvais faire, artistiquement parlant. Elle m'a présenté les personnes qu'elle pensait pouvoir le plus correspondre à ça, qui étaient Brav et Matthieu. Et franchement, elle a vu juste parce que je trouve que le match est parfait, et on s'entend super bien, ils m'apprennent beaucoup de choses… Moi, je leur apporte un point de vue extérieur, je pense, comme un vent nouveau. De leur côté, ils m'apportent tout ce qu'ils savent de leur longue expérience.

Vous êtes franco-marocaine, on l'entend dans votre musique notamment dans votre titre "Casa", où vous parlez de la ville avec beaucoup de nostalgie. Pour toutes ces personnes qui sont loin de leurs racines, comment tenir, comment préserve-t-on sa culture, ses souvenirs, ses rêves ?

Je pense que quand on a grandi dans un pays différent du pays dans lequel on va continuer d'évoluer, c'est vraiment ancré. On n'est pas obligé de forcer pour garder sa culture, pour ne pas se perdre. Je pense qu'au contraire, quand on arrive dans un nouvel endroit, il faut s'ouvrir et il faut prendre ce qu'il y a à apprendre. Je ne force pas pour garder ma culture, parce que je sais que c'est en moi et que ça fait partie de moi et c'est ce qui a fait la personne que je suis aujourd'hui.
Le fait d'évoluer en France, dans un autre pays, ça continue de me forger et ça continue à faire de moi la personne que je deviens. J'en suis hyper fière. Je n'essaie pas de m'imposer ou de rester dans une vision fermée. Il faut rester ouvert et il faut découvrir. Il ne faut pas avoir peur de ce qui nous est étranger. Si tu es en accord avec toi-même, il n'y a pas de raison de forcer pour garder ta culture. C'est imprégné.

Ouidad ©Mateo Gallego

Vous n’avez pas peur de parler de douleur, de colère, de deuil. On parle de sentiments qui sont encore assez tabous, qui sont difficiles. Y a-t-il derrière une volonté de vous dévoiler et de permettre à vos auditeurs de prendre soin de leur santé mentale ?

Oui, totalement. Je pense que la meilleure manière, c'est d'extérioriser. Il faut savoir accepter ses sentiments. En vérité, je l'apprends en grandissant. On est hyper pudique et on essaie de refouler ce qu'on ressent, nos émotions, mais, ça ne fait qu'empirer les choses. J'espère que les personnes arriveront à mettre des mots sur ce qu'elles ressentent, celles qui m'écoutent, et à extérioriser grâce à mes chansons. Mon but, ce n'est pas de réconforter ou quoi, parce que, par exemple, pour le deuil, il n'y a rien qui peut te réconforter, mais d'aider à parler, comprendre ses émotions, les faire sortir.

"On peut aussi faire guérir avec les mots."

En parlant du thème du deuil, dans votre titre "Je reste", vous évoquez la perte d’un être cher. Comment, selon vous, peut-on sortir de la carapace dans laquelle on s'enferme quand on perd quelqu'un, quand on fait face à la mort ?

Je pense qu'on se met une certaine pression de devoir guérir vite. Comment vais-je m'en sortir ? Comment vais-je faire ? Comme je l’ai dit, je pense qu'il faut accepter ce qu'on ressent. Je ne peux pas vraiment donner de conseils là-dessus. Je pense qu'il faut juste être gentil avec soi, être tolérant et ne pas se mettre trop de pression par rapport à ce qu'on ressent.

Malgré le poids de certaines de vos paroles, vos sons restent réconfortants, doux, mélodieux. Qu’est-ce que cela dit de vous, de Ouidad ?

Je suis hyper à l'écoute. Je déteste les gens qui disent ça ! [Rires] Mais je suis vraiment une personne hyper empathique. Je trouve du réconfort dans le fait de réconforter des gens. Et donc, tant mieux si c'est ce qu'on ressent à travers ma musique. C’est comme mon métier de pharmacienne : on peut aussi faire guérir avec les mots...

Pour terminer avec un peu de légèreté et pour mieux apprendre à vous connaître, nous allons faire un petit "Questions-Réponses". Prête ?

Oui !

Le compliment que vous n’aimez pas que l’on vous fasse ?

Franchement, j’aime tous les compliments, tout me fait plaisir mais je ne sais pas comment réagir…

Votre plaisir coupable ?

Les popcorns salés, c’est très très grave ! [Rires]

Votre dessin animé préféré petite ?

Titeuf

Pourquoi écouter "Il était une fois" ?

Parce que c'est comme un câlin qui vous donne envie de danser.

Ouidad ©Mateo Gallego

Le surnom que vous préférez ?

J'aime trop "Oui-Oui" !

Où vous voyez-vous dans 10 ans ?

Je me vois bien sur une île où je suis tout le temps en maillot et en paréo.

Si vous deviez incarner un héros ?

Pocahontas.

Qu’esquivez-vous dans la musique ?

J'esquive les gros coups de gueule qui prennent la tête.

Ouidad sera au Café de la danse le 24 octobre prochain.

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