INTERVIEW
Publié le
14 décembre 2024
Derrière sa frange aussi mature que mutine, Marie-Flore célèbre une musique aussi douce que tranchée. Une signature singulière qui traduit les maux amoureux de l’auteure-compositrice-interprète qui vient juste de dévoiler les deux clips de ses nouveaux titres "Quelques centimes" et "Tout dit", présents sur son prochain album. Pour l’occasion, l’artiste est partie loin, de Venise à Taiwan, pour porter un aller déceptif mais un retour salvateur. Si l'expression "romantico-blasée" l’a fait sourire, c’est avec autant de fraîcheur que la grande amoureuse ancre ses mots puissants sur la scène musicale.
Marie-Flore, si vous deviez vous présenter en quelques mots…
C’est difficile ! Je définirais ma musique : douce, lucide, tranchée ou tranchante ! [Rires]
En septembre dernier, vous avez sorti le clip d’un des titres de votre prochain album, "Quelques centimes". Vous y dites : "Mon dieu, qu’il est cruel ce miroir/ Qui montre, le peu de moi qui reste à voir/ Comme tes facettes de toutes façons, / un jour génie, un jour gros con". Est-ce que c’est la meilleure façon de parler des hommes en général ?!
[Rires] Pour les hommes, en général, je ne crois pas. Mais en revanche, une certaine partie de la population masculine, c’est certain ! Cette chanson parle d’une histoire d’amour que j’ai vécue et sur laquelle j’ai écrite. Elle parle aussi du rapport à soi qu’on a quand on est dans une relation où on ne se reconnait plus, qui nous transforme alors qu’on a conscience d’être en face de quelqu’un de fuyant et peu présent. C’est ce qu’expliquent ces quatre phrases.
Est-ce que l’on peut parler de relation toxique ?
C’est un terme courant et mon premier album Braquage parlait d’une relation très toxique mais ici, je dirais plutôt déceptive et tiède.
Il y a aussi le titre "Tout dit" qui fait le portrait d’une femme qui s’est livrée, sans pudeur, sur ses sentiments pour être finalement éconduite…
Et c’est moi ! [Rires]
"Je suis une très grande amoureuse."
Est-ce qu’il y a quelque chose de l’ordre de la résignation dans les relations amoureuses que vous racontez dans cet album ?
Je ne dirais pas résignation mais davantage : lucidité. Je pense qu’en tant que femme, "Tout dit" ne veut pas dire "tout accepter" mais plutôt dire tout ce qu’on pense et tout ce qu’on ressent à l'autre. C’est une manière de moins perdre son temps. Je ne suis pas une résignée mais une très grande amoureuse. Je trouve que l’amour, c’est une des choses les plus importantes dans nos vies. Écrire des chansons sur l’amour permet de mieux se lire.
Ces deux titres représentent l’esprit de votre prochain album ?
Oui car ils sont assez radicalement différents. Il y en a un qui est très balade et orchestration et l’autre beaucoup plus combatif et trempé. Ces deux ambiances seront dans le futur disque que je suis en train de terminer.
Vous avez tourné le premier clip à Venise et le second à Taiwan. Y a-t-il d’autres villes à venir ?
Tout cet album parle d’une histoire que j’ai vécue et partir loin a été une solution qui s’est imposée à moi quand j’ai été déçue et dépassée. J’avais vraiment envie de retranscrire cela dans mes clips pour être la plus sincère possible. Pour les prochains, j’aimerais continuer dans cette direction.
Est-ce une façon de montrer que les problématiques amoureuses ont quelque chose d’universel ?
Elles sont universelles et nous poursuivent où qu’on aille ! On n’est jamais tranquille avec ça et on transporte nos maux de cœur même à 8000km.
"La puissance des mots me surprend toujours."
Vous êtes auteure-compositrice-interprète. Que vous permettent les mots au quotidien ?
Bonne question ! Écrire et lire les mots des autres, les entendre et les écouter, parfois, c’est une manière de mieux lire en moi. Quand tu tombes sur une phrase écrite par quelqu’un d’autre et qu’elle te correspond, il y a quelque chose de très fort. La puissance des mots me surprend toujours.
Vous avez un style presque romantico-blasé. Avec cette coupe au carré et cette frange, vous lâchez des phrases tranchées en toute simplicité. Est-ce que c’est ça la signature Marie-Flore ?
[Rires] J’aime beaucoup cette idée de "romantico-blasée" ! Je dirais blasée dans mes disques puisque dans la musique, j’écris surtout sur des histoires qui ne se passent pas très bien. En revanche, lorsqu’elles se passent bien, je les garde au chaud pour moi ! L’écriture doit venir d’un endroit viscéral et qui te torture un peu. Dans les chagrins d’amour, il y a toujours matière à trouver des choses. C’est pour ça que mes disques parlent essentiellement de rupture, de frustration et de déception.
Votre look est rétro et moderne à la fois. Quelles sont vos inspirations mode ?
J’en ai un million ! J’aime beaucoup la mode mais ce qui me plaît, ce sont les coupes intemporelles, pas trop marquées dans le temps. J’aime la mode des années 1980/1990, comme les archives de Prada, par exemple.
Vous avez récemment chanté "J’attends l’amour" avec Jenifer pour Taratata. Cette chanson est-elle d’actualité ?
Oui et non ! Ça m’a fait rire qu’on me contacte pour ce titre car il fait écho à ma discographie et à ma manière de parler de tout ça. Disons que pour l’instant, j’ai tout ce qu’il me faut !
Que représente cette époque pour vous ?
C’est une madeleine de Proust, j’écoutais beaucoup Jenifer lorsque j’étais ado. C’était une grosse pression d’être avec une telle figure sur scène devant 30 000 personnes. C’était un grand moment.
"J’écris souvent sur mes histoires d’amour en étant nostalgique alors qu’elles ne sont pas encore finies."
Outre l’amour, est-ce que la nostalgie inspire votre travail ?
Oui, il y a toujours une forme de nostalgie. J’écris souvent sur mes histoires d’amour en étant nostalgique alors qu’elles ne sont pas encore finies. C’est un exercice très bizarre et je pense me porter l’œil puisque j’écris des choses qui finissent toujours plus ou moins par arriver. Peut-être qu’il faudrait que j’écrive des chansons plus heureuses et ça tournerait autrement ! [Rires]
Que faut-il esquiver dans la musique selon vous ?
Les mauvais conseils et les mauvaises personnes, même si on s’en rend compte souvent après. Ma mère me dit souvent : "Les conseillers ne sont pas les payeurs". Il faut s’écouter soi.
Vous serez à La Cigale en mai 2025. A quoi pouvons-nous nous attendre ?
Bonne question car je travaille dessus au moment où on se parle. Évidemment des nouveaux titres, un live revu et j’ai vraiment hâte ! On peut s’attendre à une explosion de joie, de tristesse et de folie.
Que pouvons-nous vous souhaiter ?
Que le prochain disque rencontre le plus de gens possible car c’est vraiment la musique qui m’anime. Aussi, une grande tournée et beaucoup de rencontres.
Marie-Flore sera à La Cigale les 23 et 24 mai 2025.
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