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Si l'Italie a fait coulé de l'encre à la suite de la proposition de Claudio Durigon, député de la Ligue du Nord, de donner à un jardin public le nom d’Arnaldo Mussolini, l’un des frères du Duce, la France aussi a son lot de casseroles en matière de sites aux noms jugés problématiques. Rues, parcs, écoles... Etat des lieux.
Peut-on résolument imaginer un parc Mussolini dans l’Italie du 21e siècle ? Pour Claudio Durigon, député de la Ligue du Nord (le parti populiste d’extrême-droite, ndlr), la réponse est oui. Ce proche éminent de Matteo Salvini, proposait en effet de donner à un jardin public de Latina, ville côtière située à 50 km de Rome, le nom d’Arnaldo Mussolini, l’un des frères du Duce. Polémique instantanée en terre transalpine, et Claudio Durigon se voit contraint de démissionner de son poste de secrétaire d'Etat à l'Économie et aux Finances.
En matière de controverses après l’attribution d’un nom à un lieu public, l’Italie est loin de faire exception. La France a également connu quelques remous. En 2015, Robert Ménard, maire de Béziers (Hérault) soutenu par le Rassemblement national (RN) décide de changer le nom de la rue du 19-Mars-1962, date de la signature des accords d’Evian, pour lui donner celui d’Hélie Denoix de Saint-Marc, un officier de l’armée française favorable à l’Algérie française et commanditaire du putsch des généraux en 1961. Malgré les protestations de plus d’un millier de manifestants le jour de l’inauguration, le changement de nom est officialisé.
A la Seyne-sur-Mer(Var), la même année, le maire socialiste Marc Vuillemot inaugure la rue Yasser-Arafat, du nom du Prix Nobel de la Paix 1994. Dans les rangs de l’opposition, on craint que la personnalité et le parcours politique de l’ancien leader palestinien ne viennent troubler l’ordre public. Trois ans après l’inauguration, une décision de justice viendra confirmer le choix du maire, en assurant qu’aucune atteinte n’était portée à la sécurité de la ville. La rue Yasser-Arafat côtoie désormais, dans le même quartier, la rue Yitzhak-Rabin, Premier Ministre d'Israël entre 1974 et 1977, lui aussi Prix Nobel en 1994
En 2004, le conseil municipal de Nice (Alpes-Maritimes) décide de renommer une place du centre-ville au nom de Jacques-Médecin, maire de la ville entre 1966 et 1990. Problème : l’homme a été condamné à plusieurs reprises par la justice pour détournement de fonds, abus de bien sociaux, corruption ou encore fraude fiscale. Trop pour le préfet de l’époque Pierre Breuil, qui parle d’une “erreur manifeste d’appréciation” de la part de la municipalité et demande au tribunal administratif de Nice d’annuler sa décision. Un jugement en appel, en 2007, de la cour administrative d’appel de Marseille le verra néanmoins débouté.
En mai cette année, le conseil municipal de Marseille (Bouches-du-Rhône) a voté la proposition du maire Benoît Payan de débaptiser l’école primaire Bugeaud. Le maréchal Thomas Robert Bugeaud est connu pour avoir réprimé dans le sang les mouvements insurrectionnels du 13 et 14 avril 1834 à Paris, en plus d’avoir joué un rôle décisif dans la colonisation de l’Algérie à partir de 1836. L’école du 3e arrondissement de la ville porte désormais le nom d’Ahmed Litim, tirailleur algérien mort à 24 ans le 25 août 1944 en libérant Marseille de l’occupation allemande. La preuve que les noms de lieux, comme les femmes et les hommes dont ils portent le nom, sont soumis aux effets du temps.