RIVE GAUCHE
S'"enjailler" au BAOU à Marseille avec les plus belles "go" de la Cité phocéenne…il ne s'agit pas ici de patois sudiste mais bien de "nouchi". Comment cet argot originaire de Côte d'Ivoire s'est installé dans le dictionnaire français ?
Dans "Copines", Aya Nakamura qui vient de sortir son quatrième album DNK, chante son besoin de "vrai djo", "mec" en nouchi, argot ivoirien issu des quartiers populaires d’Abidjan. Si Vincent Cassel n’est plus un cœur à prendre, la chanteuse française qui fait danser la planète pourra au moins se rassurer d’avoir contribué à inscrire le nouchi dans le dictionnaire français. Le Petit Larousse illustré, traditionnellement conservateur, intègre depuis 2020 les mots "ambianceur", "brouteur" et "boucantier", qui renvoie à celui "qui aime afficher son aisance matérielle et son style de vie ostentatoire". Autrement dit, il s'agit du bling-bling à l’ivoirienne. Pas étonnant que l'idiome né dans les années 1980 se répande largement dans les milieux artistiques, notamment avec l'émergence de la musique "zouglou", dont le groupe Magic System est le plus célèbre des ambassadeurs. En Côte d'Ivoire, chacun a son mot favori, dans ce mélange de français, d'anglais et de langues locales comme le baoulé.
En constante évolution, le nouchi n'est pas encore considéré comme un langage à lui seul mais il se fait entendre parmi les journalistes, notamment au micro de la radio "Gbich ! Ephème" ou encore chez les hommes politiques. Devenu un marqueur identitaire dans l'un des pays les plus francophones d'Afrique, cet argot est un outil de communication efficace, puisqu'il permet d'être compris par le plus grand nombre. On l'étudie même sur les bancs de la plus grande université du pays, Félix Houphouët-Boigny, dans le quartier de Cocody à Abidjan. Les multinationales vont-elles aussi céder à l'appel de ce langage qui malmène le français autant qu’elle l’enrichit ? D'ici là, prenons un peu de hauteur avec Didi B.