INTERVIEW
Publié le
6 octobre 2021
Zadig, Madame Bovary, Gargantua… Aussi prestigieux soient-ils, ces protagonistes de classiques littéraires dorment parfois trop longtemps sur les étagères surchargées des bibliothèques de CDI. Avec Les Liseuses, premier opus du label musical Volume Sonore, Audrey Siourd dépoussière ces œuvres mythiques en conviant des célébrités telles que Féfé, Augustin Trapenard, Olivia de Lamberterie ou encore Samir Bouadi à interpréter les textes à leur façon, sur fond d’électro, de dub ou de jazz country. En résulte de véritables créations originales, qui connaissent un succès retentissant depuis plus de deux ans, notamment auprès des professeurs. Musique et littérature : un combo parfait qui fait battre le cœur de celle qui est à l’origine du projet, Audrey Siourd, transfuge du monde de l’édition où elle a travaillé pendant plus de dix ans, notamment au côté de Jean d’Ormesson. A S-quive, elle transmet ses bonnes ondes.
Vous avez créé Les Liseuses, un podcast qui dépoussière la littérature au moyen de "remix littéraires", ce qui vous a d’ailleurs valu les louanges de nombreux professeurs. Pourquoi avoir choisi ce support ?
J’aime bien l’idée qu’on puisse "entendre" la littérature. Quand j’étais petite j’adorais écouter les histoires lues par des comédiens, enregistrées sur des disques. Le petit prince lu par Gérard Philippe, L’île mystérieuse de Jules Verne adapté et interprété par Pierre Dux… Ça m’embarquait très loin, j’avais l’impression de participer à l’histoire, d’être à côté des personnages. Une histoire m’était contée et mon imagination se chargeait de fabriquer les images. Comme la lecture, mais avec un pouvoir suggestif particulièrement fort. La voix, l’oralité, la musique, les sons sont des médiums puissants pour transmettre les histoires et ce depuis la nuit des temps.
Féfé pour Bovary, Leeroy pour Sinbad... Comment choisissez-vous les artistes pour interpréter ces classiques ?
Tout est une histoire de rencontres et d’enthousiasme pour les projets. Féfé et Leeroy adorent les histoires, les livres, et ils ont été emballés par l’idée de participer aux remix. Je crois que ça leur a plu de s’aventurer dans quelque chose où on ne les attendait pas forcément.
Avec ce podcast, vous revenez à vos premiers amours : le journalisme. Comment vous est venue l’envie de transmettre ?
Nous sommes tous des transmetteurs. Chacun apprend de la vie, des expériences, des rencontres, et ce serait bien triste de garder tous ces acquis pour soi. Il y a cette phrase (transmise par mon père) qui dit : “ce que tu gardes pour toi est perdu à jamais, ce que tu donnes est à toi pour toujours”. C’est une bonne philosophie je trouve.
Vous avez notamment travaillé au côté de Jean d’Ormesson. Que vous a-t-il appris ?
Beaucoup de choses car c’était un super transmetteur, riche d’un savoir immense qu’il avait plaisir à partager, toujours bienveillant, jamais condescendant. Je retiens aussi certaines de ses façons d’être. Par exemple le fait qu’il ne soit jamais nostalgique. C’était quelqu’un qui regardait devant.
Avant-hier, une panne mondiale a coupé notre accès aux principaux réseaux sociaux pendant plusieurs heures. Comment l’avez-vous vécu ?
Je me suis dit “ouf, un peu de répit !”. Et puis j’ai pensé qu’une bonne partie de nos vies ne tenait qu’à un fil conducteur. Il y a beaucoup de choses fabuleuses à tirer des outils technologiques mis à notre disposition (notamment pour aider à la transmission), mais tout est une question de dosage, comme on dit.
Photographe à vos heures, vous avez conçu une exposition sur les femmes lisant dans le métro. Vous aussi, comme NKM, vous trouvez des moments de grâce dans le métro. Quelle lectrice êtes-vous ?
Une lectrice assidue, fidèle, curieuse, éclectique et reconnaissante.