MUSIQUE

"Disco, I’m coming out" : un cocktail de fête et de luttes à la Philharmonie de Paris

Publié le

26 février 2025

À la Philharmonie de Paris, l’exposition "Disco, I’m coming out", ouverte depuis le 14 février dernier, met en lumière la richesse et la complexité du genre. Immersion complète, entraînante et nuancée dans l'univers du disco. De la danse aux luttes, piqûre de rappel : la musique est politique.

©Hasse Persson, High fashion model, Potassa de la Fayette, 1978

Premier acte de l’exposition, plongée dans la pénombre, entre boules à facettes et paillettes scintillantes, ambiance qui fait écho au légendaire Studio 54, une discothèque new-yorkaise des seventies et véritable scène de théâtre où se jouait, entre deux danses survoltées, la défense des libertés. Pantalons pattes d’eph et boules à facettes donc, le disco, c’est aussi les clichés, et surtout les clichés dans l’imaginaire collectif, mais Jean-Yves Leloup, commissaire de l’exposition a minutieusement travaillé aux côtés de Marion Challier, commissaire associée, et Patrick Thévenin, conseiller, pour faire passer le message : loin de n’être que paillettes, le disco est une vraie révolution. "Ce qui m’intéresse, c’est d’articuler la création musicale et son contexte, quel en est l’arrière-fond politique et historique ? Comment la société se reflète dans la musique ?", explique le commissaire au micro de France Info.

©Arnaud Baumann, Bustier Issey Miyake, Le Palace
©Michael Abramson, Série Chicago Southside Nightclub, 1974-1977

Fièvre émancipatrice

Bande-son de l’exposition millimétrée par Dimitri from Paris. Résultat : plongée au cœur des fondations du disco au début des années 1970, aboutissement de la fusion énergétique entre la soul, le funk et les percussions afro-américaines et latines. La première partie, intitulée "Let’s groove", explore l’essence du genre et son odeur émancipatrice. De Diana Ross à Donna Summer, les icônes afro-américaines sortent de leur registre avec des sons qui se transformeront vite en hymnes libertaires. "I Will Survive" de Gloria Gaynor, avant d’être couramment associé à la victoire des Bleus au Mondial 98, est un chant féministe, fruit de l’ère disco. Découverte d’une décennie où la communauté noire célèbre sa culture et où des minorités lui emboîtent le pas, notamment la communauté LGBTQ+. C’est justement ce qu’évoque "I am what I am" en seconde partie de l’exposition. Un cocktail de fête et de luttes, illustré entre autres par le Polaroid SX-70 du photographe Tom Bianchi. Entre 1975 et 1983, il se rend sur l’île de Fire Island aux États-Unis, eldorado des homosexuels où la fulgurance des sourires et des joies transperce les images. Beauté qui pince le cœur, après les émeutes de Stonewall et avant les ravages du sida, il écrit dans son livre Fire Island Pines Polaroids 1975-1983 : "Fire Island représentait pour moi bien plus qu’un endroit, j’y ai trouvé une force qui a donné naissance à mon âme gay et l’a nourrie". De 1970 à 1980, c’est la décennie où il faut prendre de la place, sa place, à toute vitesse. Métaphore du tempo disco : 120 battements par minute c’est rapide et c’est avec cette même fulgurance qu’on aura vu le genre éclore, exploser, puis décliner en une dizaine d’années, pour finalement se transformer et renaître…

©Meryl Meisler, Studio 54, NYC, 1977
©Meryl Meisler, Dupont's Party, 1977

Un genre immortel

50 ans après la première soirée disco organisée à New York par le DJ David Mancuso, l’exposition rend grâce au genre et l’aborde à travers la mode, le cinéma, l’art et la photographie. Le panoramique proposé a la justesse de transporter l’essence de cette génération immortelle jusqu’à aujourd’hui. "Night Fever" et "Celebration", les deux dernières parties du parcours, se répondent. Explosion du genre symbolisée par le 7ᵉ art avec le film : La Fièvre du samedi soir puis son rejet à cause de sa surexploitation dès 1979, tout aura laissé une trace. Jamais disparu et toujours réinventé, le plaisir est total quand, entre ces quatre murs, se lient Diana Ross, une pionnière disco, à Dua Lipa, l’ultra inspirée. Des décennies pourtant les séparent… "Le dernier jour du disco", un des titres phares de Juliette Armanet, dont est exposé le costume de scène époustouflant, n’a jamais fait date. Jusqu’au 17 août prochain, la Philharmonie entrechoque histoire, décennies, technologies et communautés pour rappeler, entre les danses et les peines les plus douloureuses, que nos sweet dreams were made of this.

©Joachim Bertrand, Philharmonie de Paris
©Bill Bernstein, Xenon, 1979
©Bill Bernstein, PARADISE GARAGE, 1979

"Disco, I'm coming out" à la Philharmonie de Paris jusqu'au 17 août prochain.

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