LA BEAUTÉ DE
Publié le
30 juillet 2024
Cara Delevingne, Adèle Exarchopoulos, Shay… Lorélen Coriton a posé ses pinceaux sur nombre de femmes ancrées dans l’époque pour des campagnes Beauté comme Dior ou des shootings pour Yves Saint Laurent. Adepte d’une imagerie retro-vintage aux tonalités chaudes, la maquilleuse de 28 ans avance avec passion pour évoluer dans ce milieu très concurrentiel. S-quive est allé à sa rencontre pour aborder son parcours, son processus créatif mais aussi ses riches expériences vécues dans l’univers de la Beauté.
Si vous deviez vous présenter…
Je m’appelle Lorélen Coriton, j’ai 28 ans et je suis maquilleuse professionnelle indépendante dans la beauté et surtout dans l’événementiel depuis environ 5 ans. Je fais plutôt des VIP notamment pendant la fashion week. Je travaille moins dans le côté mode du métier. J’essaie de le développer mais quand on est maquilleuse, on est vite enfermée dans une case : soit évènementiel, soit mode. On ne peut pas toucher aux deux en même temps, c’est compliqué. Le travail que j’ai réalisé avec des magazines, pour le moment, était avec des célébrités, c’était donc pour des VIP et non des éditos. En revanche, ça m’intéresserait d’en faire. J’ai également travaillé pour un show et j’ai adoré.
Comment avez-vous développé votre passion pour le maquillage et ce souhait de devenir make-up artiste ?
Je n’étais pas la petite fille qui se maquillait avec le rouge à lèvres de sa maman. [Rires]. Cette passion est venue plus tard à l’adolescence, cette période où tout le monde se cherche, avec ce besoin de gagner en confiance en soi. Le maquillage m’a permis de m’évader et de m’exprimer à un moment où j’en avais besoin faute de le faire à travers la parole. Je me maquillais beaucoup, chez moi, le week-end. J’aimais jouer avec les textures et les couleurs. Au lycée, pour aller en cours, je me faisais tous les matins des looks full-face avec du rouge à lèvres rouge. Au collège, je n’avais pas le droit de me maquiller, je me suis donc lâchée plus tard pour m’exprimer ! J’ai toujours adoré ça. Je regardais les pubs de parfums quand j’étais petite à la télévision, ça m’émerveillait, le maquillage était toujours hyper joli. A l’époque, je ne pensais pas en faire mon métier. Chez moi, dans les alentours de Nantes, il n’y avait pas beaucoup de personnes qui exerçaient ce métier. Ça s’est donc réalisé plus tard, après le bac. J’ai fait des études d’esthétique, un CAP, à Nantes. Ma professeure de maquillage, avec qui j’avais cours une fois par semaine, a convoqué ma mère et m’a poussé à partir en disant que j’avais du talent. C’est grâce à elle que je suis allée faire la Make Up For Ever Academy à Paris, avec le soutien de mes proches bien sûr.
"La période qui m’influence le plus dans le maquillage et que je préfère, c’est les années 1990."
Votre imagerie a des tonalités chaudes et rétro. Quelles sont vos inspirations et vos icônes make-up artistes ? Pourquoi ?
J’ai un style assez vintage en général parce que ça m’inspire beaucoup, notamment dans mon travail. En ce moment, ce sont les années 1960, je fais beaucoup de compositions avec les cils. A l’époque, c’était pour agrandir les yeux. J’adore leurs positionnements selon les formes d’œil. La période qui m’influence le plus dans le maquillage et que je préfère, c’est les années 1990. C’est l’époque des Super Models mais surtout de la naissance des vrais glam avec les gros brushings, les couleurs un peu froides sur les yeux et du rouge à lèvres nude. Il y a plusieurs make-up artistes que j’apprécie pour des raisons très différentes, ce qui est drôle parce que ça me représente assez bien. Raoul Alejandre, maquilleur qui a travaillé en tant que DA chez Valentino Beauty, m’inspire beaucoup par sa personnalité très forte et assez vintage. On retrouve beaucoup de couleurs, de graphismes dans son travail avec un grain de photo vintage. Il a vraiment son identité et il en impose. Il touche à tout en faisant beaucoup de contenus par lui-même où il fait les makeup, prend les photos et fait les retouches. Nina Park est une maquilleuse coréenne qui maîtrise à la perfection les glam naturels. Elle réalise beaucoup de looks avec les célébrités. Ce que j’apprécie particulièrement dans son travail, c’est qu’elle met vraiment les traits de la femme en valeur avec du nude, un jeu d’ombres et de lumières, et très peu de couleurs. La make-up artiste Isamaya m’inspire également beaucoup avec le travail qu’elle réalise sur les cils, mais aussi ses bouches laquées. A la base, elle est plus dans les FX, c’est-à-dire les maquillages avec des effets spéciaux, et c’est peut-être pour ça que je m’identifie moins à elle. Mon côté mode est, par contre, influencé indirectement par son travail qui est assez dark. J’aimerais beaucoup tester sa marque de maquillage mais elle n’est disponible qu’à un endroit en France. Enfin, la reine Pat McGrath bien sûr. Elle est incroyable et inspirante pour beaucoup de monde avec ses makeups iconiques et les tendances qu’elle lance à chaque saison juste en claquant des doigts. [Rires]. J’adore sa marque de maquillage.
Vous avez eu l’occasion de rencontrer plusieurs personnalités dans le cadre de votre travail, quelle est celle qui vous a le plus marqué ?
Je dirais qu’elles m’ont toutes marqué à leur manière parce qu’elles sont toutes arrivées à un moment de ma vie où j’évoluais et j’étais hyper contente à chaque fois d’avoir l’occasion de travailler avec elles. Celles qui m’ont vraiment marqué ce sont les premières personnes qui m’ont fait confiance comme Caroline Receveur et Fiona Zanetti que j’ai suivie tout au long de la fashion week. C’est grâce à elles que je me suis développée. J’en garde d’hyper bons souvenirs.
Vous travaillez souvent avec Dior, notamment pour la mise en beauté de Fanny Bourdette-Donon mais vous avez aussi réalisé un summer look naturel sur la mannequin Cara Delevingne lors d’une campagne Dior à Portofino. Quel souvenir en gardez-vous ?
C’était génial. Avec Dior, je maquille toujours dans des endroits et des conditions incroyables : dans L’Orient Express, à Portofino en Sicile… Les teams sont hyper chaleureuses et accueillantes. Fanny Bourdette-Donon est vraiment géniale, c’est aussi grâce à elle que je me suis développée aussi. Je ne les remercierais jamais assez de me faire confiance autant que l’équipe le fait et franchement j’adore bosser avec elle. J’en garde encore de très bons souvenirs.
Aussi, à l’occasion du lancement de la collection Yves Saint Laurent Loveshine, vous avez réalisé un look glamour sur l’actrice Adèle Exarchopoulos, racontez-nous…
C’était un projet hyper challengeant parce que c’était la première fois que je la maquillais. C’est une actrice et une personne que j’aime beaucoup. Ça a été un super moment avec elle, c’est une personne adorable. On a opté pour mon look glam signature, c’est ce que je fais quand je veux un makeup efficace qui tienne dans le temps et qui soit hyper simple et efficace. Il est composé d’un liner fumé, d’un teint et d’une super bouche pulpeuse avec les Loveshine d’Yves Saint Laurent, bien sûr. Au préalable, je prépare toujours des petites inspirations avec plusieurs moodboards sur Pinterest. On est resté sur quelque chose qu’Adèle a l’habitude de faire. C’est elle qui a choisie parmi plusieurs inspirations que j’avais déjà optionnées en amont. Bien sûr, il faut que ça reste dans l’esprit Yves Saint Laurent mais Adèle avait déjà travaillé aussi avec eux.
"Je m’adapte toujours au monde et à l’énergie de la personne que je maquille en ajoutant ma touche."
Travailler avec les magazines est une des facettes de votre métier… Vous avez réalisé le look audacieux comprenant un liner graphique de la chanteuse Shay pour son apparition dans le Numéro magazine. Comment s’est passé votre processus créatif ?
C’était une expérience plus particulière parce que le moodboard s’est fait en fonction des looks qui étaient hyper imposants, avec des grandes robes à strass de soirée. On a aussi su, en amont, que le shoot serait en noir et blanc. Dans ce cas, on essaye de faire ressortir le makeup avec un travail d’ombres et de lumières, on va moins aller vers la couleur. J’ai décidé d’opter pour un graphisme avec un côté vintage. Il fallait que le maquillage soit évolutif avec le changement des tenues. Au début, j’ai commencé avec un liner, j’ai ensuite rajouté les traits du bas pour un côté vintage et graphique, puis j’ai fait un smoky glossé pour 4 looks différents. Ça ressort super bien en noir et blanc avec le gloss, le noir, le graphisme, et ça colle bien avec ce que dégage Shay, une énergie dark féminine selon moi. Je m’adapte toujours au monde et à l’énergie de la personne que je maquille en ajoutant ma touche.
Sur votre compte Instagram, vous apparaissez dans plusieurs posts. Vous aimez autant vous maquiller que maquiller les autres ?
Quand j’étais adolescente, j’ai testé énormément de choses. Je pense que j’ai assez testé pour 30 ans environ [Rires]. Aujourd’hui, je me maquille hyper naturellement, j’aime avoir un teint hyper frais, être clean et avoir les lèvres nude bien dessinées. C’est vrai que je fais toujours pareil. Dès que je change un petit truc, ça me parait trop sur moi, c’est marrant. Cependant, j’aime bien tester de nouveaux produits donc je les change souvent mais globalement le makeup reste le même. Etant dans l’évènementiel, je sais que les gens apprécient lorsque l’on se montre. Je le fais à ma façon parce que je ne suis pas quelqu’un qui va être à l’aise avec la parole et en face caméra, puis je ne veux pas que ça prenne le dessus sur mon métier, je ne suis pas influenceuse. Les gens aiment savoir qui est derrière les looks. Savoir qui nous maquille en tant que client est important, moi-même j’aime voir le visage des autres maquilleurs. Je veux néanmoins que ça soit dosé, notamment dans mon feed Instagram. J’aimerais par la suite collaborer avec des marques et je sais qu’elles aiment savoir qui nous sommes aussi.
Qu’est-ce que vous esquivez dans le makeup ? Et dans la vie ?
Ce que j’esquive le plus, ce sont les franges entières de faux cils parce que pour moi c’est l’enfer tout simplement ! [Rires] Quand on voit les photos officielles après un shooting photo, il y a toujours un coin qui est décollé et on a envie de crier ! Souvent, je mets des faux cils individuels à la place. J’évite les franges autant que possible ou alors je les coupe. J’essaie d’esquiver le regard des autres le plus possible. L’influence des autres aussi, dans notre métier c’est très difficile. Il faut essayer d’évoluer à son échelle et ne se comparer qu’avec soi-même.
"Pour ceux qui souhaitent devenir maquilleur(euse)s, je leur dirais de s’accrocher et d’être vraiment déterminé au début car c’est très dur. Il faut beaucoup travailler et donner de soi."
Avez-vous déjà eu du fil à retordre dans la préparation d’une mise en beauté ?
Je maquille des femmes qui ont l’habitude de se maquiller et de se faire maquiller. Elles sont hyper exigeantes et savent ce qu’elles veulent. Honnêtement, ça ne m’embête pas d’avoir quelqu’un en face de moi qui sait ce qu’il veut. C’est impossible de connaître une personne entièrement la première fois qu’on la voit. Ça m’est arrivé, une fois, d’oublier mes pinceaux, c’était une horreur ! On ne peut rien faire sans, on a beau avoir toute la valise de maquillage, ça reste infaisable. C’était à mes débuts lorsque je devais maquiller Caroline Receveur. Heureusement, j’avais pris de l’avance et j’ai eu le temps de retourner chez moi les récupérer. Depuis, ça n’est plus arrivé !
Qui rêveriez-vous de maquiller prochainement ?
J’aimerais beaucoup maquiller Dua Lipa. Sur sa tournée, l’année dernière, j’ai vu que ses glam étaient hyper créatifs, il y avait beaucoup de strass de couleurs. Je pense que ça pourrait bien matcher. Pour les artistes français, j’aime beaucoup Eva, anciennement Eva Queen. Dernièrement, elle a changé de DA et je la trouve hyper intéressante. J’ai toujours vu beaucoup de potentiel parce qu’elle a un beau visage. Elle a une nouvelle styliste que je connais bien avec qui je travaille. J’adore sa nouvelle image et j’aimerais beaucoup travailler avec elle.
Quels conseils donneriez-vous à un(e) jeune qui souhaite devenir maquilleur(euse)s aujourd’hui ?
Pour ceux qui souhaitent devenir maquilleur(euse)s, je leur dirais de s’accrocher et d’être vraiment déterminé au début car c’est très dur. Il faut beaucoup travailler et donner de soi. Attention tout de même à ne pas être trop dur avec soi, il faut être indulgeant face aux erreurs que l’on fait. J’ai tendance à être très dure avec moi, on a le droit de commettre des erreurs, elles nous permettent d’avancer. Surtout, il faut rester soi-même.