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Entre gestes précis et toiles poétiques, Gabrielle Rul propose une œuvre hors du temps

Publié le

1er novembre 2022

Elle observe le monde qui l’entoure pour mieux apposer son art sur toile. Telle une respiration hors du temps, l’artiste et mannequin Gabrielle Rul manie avec passion et audace les matières présentes dans son cadre spatio-temporel. Aussi à l’aise devant que derrière l’objectif, la peintre met à nu ses idées et les personnages qu’elle dessine. Expression, gestuelle et sincérité forment le trio constant de ses créations prometteuses.

Gabrielle Rul

Gabrielle, si vous deviez vous présenter en quelques mots…

C’est toujours difficile de se présenter mais si je devais résumer au plus court je dirais que je suis quelqu’un qui raconte des histoires sur papier.

Comment êtes-vous devenue mannequin ?

Après mes études au Studio Berçot, j’ai déménagé à Paris dans l’espoir de décrocher un stage. La réalité financière m’a rattrapé et je me suis retrouvée à faire plein de petits boulots. En parallèle, on me contactait pour des projets de mannequinat par ci, par là. J’ai décidé de tenter ma chance en agence et après bien des refus, j’ai pu signer avec Oui Management et débuter ma carrière.

Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans ce métier ?

La possibilité de pouvoir prendre part à tant de projets différents et de pouvoir exécuter la vision d’une équipe. C’est comme une danse pour moi, tout le monde a travaillé dur pour arriver à la représentation finale et c’est un travail d’équipe que de donner vie au ballet final. Le déroulé des journées se ressemblent (make-up, stylisme etc..) mais chaque set est singulier, à sa manière.

"Mon inspiration vient de la rue, des expériences de vie, de tout ce que je peux observer. C’est un peu comme mon quotidien à travers un prisme d’illustrations."

Vous êtes aussi designer. J’ai notamment remarqué votre participation en tant que styliste d’accessoires pour un shooting Numero Homme Berlin avec Vincent Cassel…

J’ai eu la chance de travailler plusieurs fois avec le photographe Joe Lai qui m’a fait confiance pour intégrer mon travail dans plusieurs de ses séries. Le thème pour celle-ci, était le vaudou. J’étais à Londres et n’avait aucun matériel, j'ai donc dû faire avec les moyens du bord. Il y a quelque chose que j’aime dans tout ce qui est métier de main, c’est de se confronter à plein de problèmes et de devoir trouver des solutions pour aboutir à un projet.


Aujourd’hui, c’est la peinture qui occupe la majeure partie de votre temps. D’où vient cet attrait pour cette discipline ?

J’ai toujours aimé gribouiller, ou faire quelque chose de mes mains : de la broderie, du tricot, du dessin, fabriquer des boîtes ou encore des montgolfières en papier. Lors des déplacements pour le mannequinat, on se retrouve seule avec soit même et l’on devient une poupée pour les différentes personnes pour qui nous travaillons. Cela laisse très peu de place à l’expression personnelle, et pour mon équilibre personnel, j’ai toujours eu besoin de m’exprimer d’une manière ou d’une autre. La broderie et le dessin ont été les moyens de garder une part de créativité personnelle lors de ces voyages.

Une poésie singulière dénote de vos productions. Comment définiriez-vous le style de vos œuvres ?

J’aime voir mon travail comme des histoires. Ce sont des histoires que je me raconte et que j’illustre. Et comme chaque histoire comprend plusieurs versions, j'invite les gens à trouver la leur.

"Le rythme urbain est parfois oppressant et, à défaut de pouvoir m’évader quelque part, je m’accorde des respirations sur papier, je crée des endroits où j’aimerais être."

La mode influence vos toiles ? Quelles sont vos inspirations ?

Mes personnages sont toujours représentés nus. Je pense que c’est une façon pour moi de bien délimiter les deux professions. En tant que mannequin, on endosse des rôles, on se cache derrière des tenues, on adopte des attitudes… Les personnes que je griffonne sont dénudées de tout artifice, en eux-mêmes, je me concentre plus sur les expressions et la gestuelle, sans le vêtement tout devient plus sincère de mon point de vue. Mon inspiration vient de la rue, des expériences de vie, de tout ce que je peux observer. C’est un peu comme mon quotidien à travers un prisme d’illustrations. Des images me viennent tout le temps en tête, je dessine beaucoup mentalement. C’est un peu comme un projet qui germe dans mon esprit et quand je sens que l’idée a assez maturé, je la couche sur le papier. Je n’arrive jamais au résultat escompté mais ça donne des idées pour la suivante et ainsi de suite…

Gabrielle Rul

Sur Instagram, vous posez régulièrement au milieu de vos créations. C’est aussi une façon d’immortaliser leur conception ?

Je vois Instagram comme un outil de travail obligatoire de nos jours. C’est une vitrine pour mon travail et pour moi-même. Je n’aime pas trop me perdre dessus mais ce serait mentir et se voiler la face en disant que je n’en ai pas besoin. C’est mon portfolio, cela permet aux gens de voir qui se trouve derrière les pinceaux. Je reste assez détachée de tout ça ou du moins, j’essaie. Cela devient vite chronophage et je préfère gratter mon papier de ma plume plutôt que de me perdre dans un infinite scrolling.

"4 seasons, 1 city", "Autumn Leaves", "Une notion du temps", "Sous les fleurs" … Les titres de vos peintures font souvent référence au temps et à la nature. Ce sont des thématiques qui vous préoccupent particulièrement ?

On retrouve dans mes dessins beaucoup d'éléments de la ville et de la nature. On peut sans doute expliquer cela par mon besoin de m’échapper des villes, que j’affectionne aussi mais qui peuvent vite devenir étouffantes. J’adore observer en permanence les gens autour de moi, on apprend beaucoup en observant, mais le rythme urbain est parfois oppressant et, à défaut de pouvoir m’évader quelque part, je m’accorde des respirations sur papier, je crée des endroits où j’aimerais être. Je dors aussi très peu, alors la nuit j’ai souvent l’impression de “voir” le temps défiler lentement jusqu’au matin. La notion de temps est très abstraite et insaisissable à mon sens. C’est comme un défi de réussir à illustrer le temps qui passe.

"J’ai la chance de pouvoir vivre de mon art et pouvoir utiliser cette opportunité à bon escient m’importe énormément."


Votre travail est visible sur Artsper. Vous avez aussi exposé une fresque au Pavillon des Canaux (Paris XIXe) à l’occasion de la journée de la femme et fait des collaborations autour de l’élaboration de t-shirts avec Bengt, entre autres. Quelles particularités artistiques vous attirent lorsqu’on vous propose un projet ?

J’aime découvrir de nouvelles choses quand on me propose des projets, développer de nouvelles connaissances techniques, trouver comment apposer mes dessins sur de nouveaux supports ou me plier aux contraintes d’une autre profession. Pour ce qui est des fresques ou des dessins pour des causes ou des associations, je pense que c’est important de se mettre au service des autres. J’ai la chance de pouvoir vivre de mon art et pouvoir utiliser cette opportunité à bon escient m’importe énormément. Si je peux trouver un moyen de mettre mon art sur quelques murs pour apporter un peu de légèreté, je le fais avec plaisir.  On peut voir le monde sous une autre perspective, il y a des périodes où je me demande ce que je fais avec mes crayons et ma peinture, où cela me semble bien futile. Pouvoir apporter de la joie et m'ancrer dans des projets pour aider certaines personnes m’aide à trouver du sens à ce que je fais.

Êtes-vous déjà en préparation d’un prochain challenge artistique ? Ou quelle serait votre ambition personnelle dans le monde de l’art ?

C’est un peu trop tôt pour en parler plus en détail mais un duo show est en cours pour 2023 avec Victor Thibeault qui fait de très belles lampes (@atelierallume).

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